Jon est un jeune musicien aux grandes ambitions, mais rêveur et plutôt seul. On lui propose un jour de remplacer le temps d’un concert le joueur de clavier d’un groupe pour le moins étrange, dont le leader, un certain Frank (Michael Fassbender), porte en permanence une fausse tête cartoonesque en papier mâché qui masque son vrai visage. Le héros se retrouve malgré lui entrainé dans une maison perdue au milieu de l’Irlande afin d’enregistrer un disque avec ce groupe dont il ne connait presque rien.
On pense toujours savoir à peu près ce qui va se passer ensuite, et ça n’est jamais le cas. Frank est un film différent. Le réalisateur change plusieurs fois de registre, on est parfois émus, parfois morts de rire, souvent perplexes. Mais l’originalité a un prix, et il est certain que cette histoire va rebuter une bonne partie des spectateurs. Concentrons nous d’abord sur ce qui marche.
L’une des choses constante dans le film est la qualité de la musique, originale et accrocheuse sans jamais tomber dans la B.O. facile pour plaire au plus grand nombre (il n’y a d’ailleurs aucun titre qui n’a pas été écrit pour le film, et tous les morceaux sont joués et chantés par les acteurs). On peut saluer cet effort, tellement il aurait été facile et paresseux de placer quelques tubes pop-rock anglais connus de tous dans un film qui traite de ce sujet.
Presque tous les personnages sont intéressants, drôles et recherchés, mis à part « Nana », la fille qui n’apporte rien à l’histoire. Jon (Domhnall Gleeson) est le seul de la bande à être à peu près normal, c’est à lui que se rattache le spectateur. On se demande en permanence si les autres sont des génies ou des cinglés, mis à part Frank, qui est les 2 à la fois de façon assez flagrante. Clara (Maggie Gyllenhaal) est insupportable et géniale, elle est l’hystérique flippante du groupe. Son rôle est jusqu’au-boutiste mais très réussi. Le bassiste du groupe, Baraque, est joué par un Français (François Civil) qui ne s’exprime que dans notre langue, bien qu’aucun des personnages ne comprenne un mot de ce qu’il raconte, ce qui rajoute encore au côté décalé au film, dont l’humour est parfois proche de la série Flight Of The Conchord.
Frank est évidement fortement inspiré de Frank Sidebottom, personnage créé par Christopher Mark Sievey, musicien anglais incompris aussi fou que génial qui portait réellement un masque similaire à celui du film en permanence. Mais le film revendique ne pas être un biopic et le personnage interprété par Fassbender est presque un prétexte à une suite d’histoires loufoques et à la création d’un univers improbable.
La deuxième partie du film est plus difficile à regarder. Il ne faut surtout pas s’attendre à une fin traditionnelle ou qui va dans le sens de ce qu’attend le spectateur. Le comique tourne au pathétique, on ne comprend plus où tout cela veut en venir, et on ressort de la salle un peu perplexe. Au final, on a l’impression que, comme le groupe de Frank, ce film ne cherche jamais à plaire au public, mais tient principalement à rester authentique et non-conformiste, en laissant transparaitre certaines traces de génie. Un ovni imparfait qu’on a envie d’aimer comme il est.
