Voici un des films les plus attendus de ce début d’année 2014. Et pour cause, alors qu’il était annoncé comme le coup de cœur de la presse, on en sort malheureusement quelque peu insatisfait. Voici pourquoi.
Yves Saint-Laurent de Jalil Lespert est un film qui retrace les vingt premières années du succès du couturier (Pierre Niney) ainsi que son histoire d’amour avec son pygmalion Pierre Bergé (Guillaume Gallienne) et c’est là que l’histoire coince. On réalise très vite que ce film est l’histoire d’Yves Saint-Laurent vu par Pierre Bergé, et bien que ce film soit tiré et librement adapté du livre Yves Saint-Laurent de Laurence Benaïm, on peut vite penser que Pierre Bergé a tiré les ficelles de cette production.
Yves Saint-Laurent est montré comme étant un artiste timide et tourmenté voire carrément maniaco-dépressif (il a fait un séjour dans un hôpital psychiatrique) et drogué, considérant devoir son succès à Pierre Bergé, qui possède un grand contrôle sur le couturier. Cet ascendant est subtilement montré grâce à la bande originale composée par Ibrahim Maalouf. Certains passages sont illustrés par des musiques dites classiques – représentant le calme, l’élégance, la prestance et le contrôle que Pierre Bergé avait sur lui-même et sur YSL – et d’autres passages sont illustrés par des musiques beaucoup plus modernes des années 50/60 (The Chambers Brothers, The Bossmen, The Emotions, We the People…). Elles représentent la bombe à retardement qu’était YSL et la crise d’adolescence que le couturier n’avait pas eu. Possédant sa propre maison de couture à l’âge de 26 ans, il ne vouait sa vie qu’au travail et n’avait pas eu le temps de vivre.
Yves Saint-Laurent est un film très esthétique qui montre le beau Paris, la belle Algérie en pleine période de guerre ainsi que le beau Maroc. Il pourrait s’apparenter à une publicité touristique qui donnerait envie à n’importe quel étranger de visiter. C’est beau, c’est propre, rien ne dépasse. C’est aussi élégant que de la haute-couture. Malgré ce bel esthétisme, ce film est néanmoins gâché par des ellipses qui peuvent perdre le spectateur. Sur une vingtaine d’année, les personnages ne prennent pas une ride. Peut-être est-ce pour montrer l’atemporalité des créations d’Yves Saint-Laurent, mais le couturier est un homme et ce film est censé montrer l’histoire de l’homme. Et c’est au moment où l’on se rend compte de ce fait qu’une ellipse d’une trentaine d’année est subitement faite, montrant un Yves Saint-Laurent et un Pierre Bergé vieillissants avec un maquillage plutôt réussi pour Pierre Bergé.
L’aspect positif de ce film réside dans les deux acteurs principaux, Pierre Niney et Guillaume Gallienne qui sont tout simplement bluffants. Ils ne font pas qu’interpréter Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé, ils les incarnent et leur jeu sauve les petites failles de ce film.
Ce biopic n’est donc pas un mauvais film. Il se laisse aisément regarder, mais on reste malheureusement sur sa faim. Faire un film retraçant vingt années de succès sur un demi-siècle de travail est loin d’être suffisant et nous pousse à en vouloir plus, à en connaître plus sur la vie du couturier.
Impossible d’écrire une critique sur ce biopic sans parler de l’autre film consacré à Yves Saint-Laurent, nommé Saint-Laurent de Bertrand Bonello avec pour tête d’affiche Gaspard Ulliel et Jérémie Renier. Etes-vous prêt à faire une comparaison entre ces deux films ? Vous allez devoir être patients, ce film ne sortira que le 1er Octobre 2014.
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