Les 8 Salopards est probablement LE Tarantino. Acteurs, références et style… Tout y est! Le film est au rendez-vous! Un vrai plaisir donc, mais attention, principalement pour un public averti, initié et motivé!
8 Salopards pour son 8ème film; Tarantino dans l’exercice de son propre style.
Très honnêtement, en regardant le poster du film, on ne peut que constater la très grande ressemblance avec celui de son dernier film “Django Unchained”. Redite ou tout nouveau concept; dur d’imaginer que ce nouveau western s’éloigne fondamentalement du style de ses derniers films. En effet, il en est très proche pour ne pas dire qu’il en est la parfaite synthèse. Avec toute sa clique d’acteurs, qui ont presque tous déjà joué dans un de ses films, on replonge dans un cinéma très codé, détaillé, qui adore les longues scènes, les dialogues interminables et la provocation par la violence.
C’est du Tarantino, entre l’inspiration des plus grands films de genre de son enfance et le twist moderne qu’il ajoute, on est toujours sur la délicate frontière entre la référence et la caricature.
D’abord, cela ne fait aucun doute que ce film est la référence absolue des “7 Mercenaires” avec Yul Brynner & Steve McQueen sorti en 1960. Outre le titre, on retrouve ce même générique jaune vif, la bande de cowboys et les grands espaces.
Les 8 Salopards ont tous une très forte personnalité, très affirmée.
Avec leurs costumes, leurs répliques et leurs flingues, chacun représente une partie de l’Amérique post Guerre de Sécession mais aussi beaucoup plus moderne. Entre l’autorité ridiculisée avec le sherif Mannix, la condition féminine complètement dénigrée avec le personnage de Daisy (Jennifer Jason Leigh) et le conservatisme absurde du Général Sandy Smithers, on tombe vite dans la caricature de la société Américaine. Et c’est ce qui fait tout le charme du film.
Mais la caricature va plus loin! Le film s’appuie sur des effets de style tellement utilisés par le réalisateur, qu’il en arrive a être la caricature “d’un film à la Tarantino”. La première séquence entre Russell & Jackson est tellement longue qu’elle nous rappelle la scène d’ouverture “d’Inglorious Basterds”.
Ça peut en agacer certains…
ok parfois beaucoup…
…c’est comme si Tarantino se regardait filmer, mais au moins c’est fait avec des supers acteurs. Jackson tient ici son meilleur rôle dans un Tarantino, Russell est plutôt bon, et on adore Tim Roth, qui, la encore, ressemble beaucoup à l’excellent Docteur Schultz interpreté par Christoph Waltz dans “Django”. Par contre, je suis beaucoup moins impressionnée par Michael Madsen et carrément déçue par Tatum.
Les 8 Salopards peut aussi être considéré comme l’ultime Tarantino, car ajouté à tous les codes et effets de style, il y a un choix artistique et technique très affirmé. Tarantino a filmé avec une caméra Super Panavision 70mm, caméra qui n’a pas été utilisée depuis “Khartoum” en 1966. Cette caméra permet de filmer en 65min, et grâce a cela, permet d’enregistrer une image beaucoup plus large et de capturer beaucoup plus de détails. Parfait pour les grands espaces comme dans “Lawrence D’Arabie”!
Sauf que la majorité du film est un huis clos!
Je trouve donc ce choix très intéressant parce qu’il amène dans ce film un certain paradoxe. S’il existe une vraie lutte dans ce film, ce n’est pas entre les personnages, mais plutôt entre la caméra et ce décor confiné. Du coup, la caméra arrive à se frayer un chemin dans cette cabane au fin fond du Wyoming, et nous propose une excellente notion de l’espace avec des plans très riches en détails. Bravo au chef opérateur Robert Richardson qui maîtrise cette largeur de format à merveille. C’est ce que j’ai le plus aimé dans ce film:j’ai apprécié à quel point la caméra avait une liberté de mouvement dans cet espace, à travers le plafond, les panoramiques ou les plans serrés sur les visages, ça fuse de partout, c’est impressionnant! Rien à voir avec une pièce de théâtre, c’est comme si on y était!
La structure de l’histoire en chapitre, comme une façon indirecte de demander au public s’il adhère ou non au style “Tarantino”.
Même si l’espace est incroyablement maîtrisé, c’est lorsque l’on aborde la notion de temps que ça se corse.
Tarantino a choisi de faire un Roadshow pour son film. Le roadshow était le nom qu’on donnait aux projections de (très) longs films dans des cinémas, qui proposaient un mini guide de la séance et un entracte, comme au théâtre. C’était des projections “évènement” comme il y a eu pour Ben-Hur, pour vous dire! Et Tarantino a voulu ce genre de format pour son film, rien que ça! #HowFancyIsThat?? #FolieDesGrandeurs
Donc on obtient 3h de film dont 2h30 de huit clos, qui s’entend sur de nombreux chapitres (6 en tout) et explore tous les angles de l’histoire. Tellement long, que Tarantino s’autorise a être lui-même le narrateur de son propre récit. #TooMuch?
Cependant, connaissant Tarantino, on se dit qu’un film aussi long ne peut que se terminer sur un magnifique chapitre final sanglant, un peu WTF, comme dans ses précédents films. Et bien, pas du tout. un petit peu quand même, c’est Tarantino, mais dans Les 8 Salopards, on obtient plus un dénouement à la Agatha Christie, qui avouons-le, fonctionne très bien pour un huis clos. En effet, l’intrigue est d’une simplicité extrême ce qui nous aide à garder le fil, mais c’est la complexité des relations et du jeu entre les personnages qui donne tout le relief au film. On se concentre donc sur l’essentiel, c’est à dire, les acteurs et la caméra. Mais cette concentration est mise a rude épreuve lorsqu’on est a la 160ème minute du film. Je ne vous cache pas que dans la salle, lorsque le titre du sixième chapitre est apparu, la plupart d’entre nous a soupiré de découragement. Donc il faut s’accrocher!
Le seul élément qui met vraiment du rythme et qui aide, c’est la bande originale composée par Ennio Morricone. C’est le facteur émotionnel du film qui est une des clés principales de l’esthétisme du film. Son Golden Globe est mérité. Personnellement, j’ai adoré ce plan fixe comme scène d’ouverture, parfait grâce à la musique.
Pour conclure, c’est un film pour les initiés qui demande de contempler ce film pour y apprécier ses qualités très techniques, ses références, ses acteurs et pour le “Tarantino” Trademark.
C’est UN MUST, car il propose une vision très poussée du réalisateur, tellement aboutie qu’elle en est presque intimiste. Est-ce que Tarantino fait du fétichisme de son propre style?
Probablement, mais il le fait en famille, avec des acteurs et son équipe technique qui l’ont suivi depuis ces premiers films.
Est-ce #DudeChick ?
80% Parce que le duo Samuel L. Jackson et Quentin Tarantino est un des plus Dudechick d’Hollywood. -20% pour l’erreur de casting avec Channing Tatum!
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Au fait #Dudechick c’est quoi?
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image source: Weinstein Company