Blue Ruin de Jeremy Saulnier

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Jeremy Saulnier, réalisateur de « Blue Ruin » est définitivement quelqu’un à suivre.  Déjà remarqué avec « Murder Party », cet ancien chef opérateur signe ici son deuxième film. Financé en partie par le crowdfunding (participation financière des internautes), le film s’éloigne des clichés indie-arty et de ceux des thrillers, des films de vengeance et des road trips. Il livre ici un film ovni barré mais précis, violent mais poétique porté par l’anti héros ultime : on a adoré.
D’abord c’est bien filmé, on pense à Jeff Nichols (le terroir américain filmé avec une très belle lumière), aux Frères Cohen (le polar « absurde ») et même à Tarantino (film de vengeance super sanglant avec un humour limite geek). Mais les comparaisons s’arrêtent là tant ce film se démarque et crée son propre style.
Extrêmement bien rythmé surtout pour la première partie du film, Saulnier alterne plans chocs avec très gros plans sur son personnage aux angles de vue toujours intéressants.
Tout ceci est allié à un scénario bien plus original que ce qui est dévoilé dans le pitch: Dwight (Macon Blair) est un SDF et son quotidien va être bouleversé lorsqu’il apprend la mise en liberté d’un double meurtrier. Je n’ai pas envie de spoiler donc    je dirai juste que s’en suivra une bataille meurtrière entre deux familles.
Au-delà de la vengeance, ce film pose la question du port d’armes aux USA mais pas de manière lourde car très bien servie par l’histoire.  Par quelques aspects, il m’a même fait penser à un western où l’ordre n’existe pas et chacun « se défend » avec ses propres armes. On s’interroge aussi sur le rapport bourreau / victime. En effet, le film nous force à nous identifier et à soutenir un homme qui, pour une raison que l’on ignore au début du film, se prépare à commettre un meurtre.
Des moments de sursaut avec des moments de grâce, de fortes émotions, de tension quasi perpétuelle, le tout porté par un casting parfait.
En particulier, Macon Blair, l’acteur principal et ami de longue date du réalisateur , qui incarne à la fois un désœuvré pour lequel on a pitié et un meurtrier pour le moins efficace mais toujours affublé d’une certaine gaucherie. Son visage extrêmement expressif jusqu’à sa prestance physique le rend très étrange entre le maniaque psychopathe et l’homme tendre presque enfantin pour lequel on a beaucoup de compassion.  La performance de l’acteur est géniale, dérangeante, vue nulle part ailleurs. On est bousculé, on s’identifie à lui puis on le rejette, on se laisse balader par lui et le réalisateur parfois, sans comprendre ce qui nous arrive. De plus son côté maladroit rajoute en suspense car on sait que tout peut arriver. On a même peur qu’il meurt avant la fin du film même s’il en est le personnage principal ! Et au milieu de tout ça, le réalisateur arrive à nous glisser une pointe d’humour.
Ce film est également plus réaliste que les thrillers que l’on voit habituellement ce qui le rend d’autant plus crédible, plus flippant  et  dont le message résonne plus fort.
En réalité ce film est très dur à commenter tant il rentre dans aucune case de genre. Entre violence, légèreté & absurdité, on se laisse porter par le personnage lunaire dans un piège qui se referme sur lui-même c’est-à-dire une course sans fin à la violence perpétrée par ces armes si faciles d’accès aux USA.
Ce film est inclassable et tant mieux !
En bref, on retient les noms de Jeremy Saulnier et Macon Blair et on brûle d’impatience de savoir quelle sera leur prochain film.

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Experte des films indépendants. Du sud américain. Avec envolée d'oies sauvages. Et filtre Instagram. #Sundance

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