Un joli film visuellement qui malheureusement n’exploite pas complètement les promesses de son pitch délirant. Une comédie dramatique avec de bons seconds rôles mais un Poelvoorde en dessous. Dommage
Dieu est un fumeur de gitane. Dieu boit beaucoup. Dieu est belge. Non ce n’est pas un syllogisme mais bien le pitch du nouveau film de Jaco Van Dormael à qui l’on doit le succès publique « Le Huitième Jour » ou encore le méconnu et incompris « Mr Nobody ».
Dieu a donc les traits de Benoit Poelvoorde. Il est en dépression, mal à l’aise dans sa peau et crie sur sa femme et sur sa fille Ea (la petite sœur de JC, qui lui est mort, vous connaissez l’histoire). Il a construit l’humanité depuis une pièce glauque d’un appartement de Bruxelles, avec un ordinateur plus proche d’un Atari que d’un Macbook pro. Il prend un malin plaisir à édicter des règles pour rendre le quotidien des humains insupportables. (aaaah le coup de la tartine de confiture qui tombe toujours du mauvais côté…)
Contrairement à ce que l’affiche laisse supposer, le personnage principal est bien cette petite Ea qui veut sortir de cette prison familiale et écrire le tout nouveau testament.
Jaco Van Dormael rappelle un peu dans ce film, le Jeunet d’Amélie Poulain à travers la recherche d’une véritable identité visuelle, presque poétique. Il y a un vrai travail sur la construction des plans puisque Il n’y en a pas un qui ressemble à un autre, que ce soit le cadrage, les angles de prises de vue, les effets numériques, la lumière, il y a toujours quelque chose à observer et tout s’enchaîne de façon extrêmement fluide.
Et, heureusement car le film manque d’un peu de rythme et la construction de son récit est beaucoup trop linéaire, voire un poil répétitif. Ea recherche 6 apôtres supplémentaires, des âmes en peine qui n’attendent plus grand chose de leur existence. La construction : flashback explicatif – petit miracle – nouveau départ est un peu lassante. Ca n’empêche pas le petit Romain Gélin, touchant en garçon de 11 ans mal dans son corps et surtout Catherine Deneuve qui n’aime plus son mari et se trouve un nouveau compagnon… très particulier, de tirer leur épingle du jeu.
Concernant Benoit Poelvoorde, il n’a aucune utilité et ses scènes sont sans intérêt. Il est pourtant à la base de ce projet via une discussion certainement tardive et alcoolisée avec Van Dormael et qui a débouché sur le pitch du film.
Mais alors que je l’ai adoré et ce, depuis « C’est arrivé près de chez vous », je dois avouer qu’il me met presque mal à l’aise dans ce film. Alors oui, le rôle est ainsi fait qu’il doit être antipathique, alcoolique voire violent. Mais j’ai eu cette désagréable impression qu’il a retranscrit à l’image, le comportement dépressif qu’il dit adopter lorsque les caméras ne tournent pas. Je préfère mille fois le Poelvoorde qui part dans des envolées, qui dégaine la bonne vanne au bon moment ou même celui tout en retenue et en pudeur des “Emotifs Anonymes” notamment. Oui c’est un coup de gueule.
Côté dialogues, le contrat est rempli. Des expressions tantôt imagées, tantôt crues, ou encore absurdes nous offrent quelques belles répliques dont certaines auraient sans mal leur place dans “Dikkenek”. Le scénario qui part d’une vraie bonne idée au fort postulat comique pouvait déboucher sur une comédie complètement déjantée mais ce n’est pas le cas.
Ce film que l’on classe à tort dans le rang des comédies n’en est pas une, ou alors elle est dramatique. Elle contient une mélancolie touchante mais dans la retenue qui émane de tous ses seconds rôles mais sans jamais franchir la ligne du pathos. Alors oui, ce film délivre un message à la limite du niais sur l’importance de vivre l’instant, d’effacer ses complexes ou ses peurs et de s’ouvrir aux autres. Oui, écrit de la sorte, on dirait une grosse guimauve. Mais la guimauve c’est bon, quand on n’en abuse pas, et de ce côté, heureusement il reste un peu de place pour une bonne gaufre belge d’après séance.
Jaco Van Dormael a une vision des 7 jours de la création qui n’est pas au niveau de celle qu’il a eu du huitième mais pour la richesse des plans et Catherine Deneuve, ça peut valoir le coup d’œil. Une fois.
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image source: Le Pacte